Ferhat Abbas, l'indépendance par la diplomatie

Ferhat Abbas, né le 24 août 1899 à Chahna près de Constantine et mort le 24 décembre 1985 à Alger, figure parmi les personnalités emblématiques de l'histoire algérienne. À la tête du gouvernement provisoire de la république algérienne, il s’est distingué par son engagement modéré et sa stratégie tournée vers le dialogue.

Ferhat Abbas : les origines d'un leader en devenir

Fils d'un fonctionnaire de l'administration coloniale d'origine kabyle, Ferhat Abbas reçoit une éducation française puis devient pharmacien à Sétif. Sa formation occidentale façonne d’abord chez lui l’idée d’une Algérie intégrée à la France. Élu au conseil municipal de Sétif, puis au conseil général de Constantine, il défend alors l'assimilation de « l'élément indigène » à la métropole.

Rapidement engagé politiquement, il devient un leader important du syndicalisme étudiant dès ses années à la faculté de pharmacie d'Alger. Ces premières expériences politiques révèlent déjà ses qualités de rassembleur et son charisme naturel.

Le Manifeste de 1943 : un tournant dans la trajectoire de Ferhat Abbas

En 1943, Ferhat Abbas amorce un tournant majeur dans son engagement politique. Ce pharmacien de 44 ans, qui militait jusque-là avec ferveur pour une complète assimilation de l'Algérie à la France, s'en détourne avec le Manifeste du peuple algérien signé par 28 élus musulmans.

Ce document historique revendique l’égalité des droits entre musulmans et Européens, une réforme des terres et la reconnaissance officielle de la langue arabe. Plus révolutionnaire encore, il exige une "République autonome" algérienne. Cette évolution reflète ainsi la désillusion croissante face aux promesses non tenues de la France.

Ferhat Abbas, président du GPRA

Après avoir rallié le Front de Libération Nationale en 1955, Ferhat Abbas gravit rapidement les échelons. Il devient président du premier gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) à sa création le 19 septembre 1958, puis du second GPRA élu en janvier 1960.

Cette nomination officialise sa place de représentant diplomatique majeur dans la lutte pour l’indépendance. Son expérience politique et sa connaissance du système français en font notamment l'homme idéal pour négocier avec les autorités coloniales et sensibiliser l'opinion internationale à la cause algérienne.

La chute et l'éviction du pouvoir

En août 1961, considéré comme n'étant pas assez ferme face au gouvernement français, Ferhat Abbas est écarté de la présidence du GPRA. Cette mise à l'écart révèle alors les tensions internes du mouvement indépendantiste.

Malgré cette disgrâce temporaire, il joue encore un rôle important après l'indépendance. En 1962, il devient président de l'Assemblée nationale constituante, soit le premier chef d'État de la république algérienne. Cependant, ses différends avec Ahmed Ben Bella conduisent à son exclusion du FLN en 1963.

Exclu du FLN, il est arrêté et détenu de juillet 1964 à juin 1965. Cependant, ces années difficiles n'entament pas sa détermination à témoigner. Il publie Autopsie d'une guerre en 1980 et L'Indépendance confisquée en 1984. Ces deux ouvrages sont essentiels pour comprendre les enjeux de la décolonisation algérienne.

Ferhat Abbas incarne un nationalisme algérien modéré, privilégiant ainsi le dialogue à la confrontation. Son parcours illustre les contradictions et les difficultés de la décolonisation, entre idéaux républicains et réalités du terrain.

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